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prononcé lors de la cérémonie du samedi 10 janvier à Izeron
Je voudrais remercier au nom de toute ma famille, Lama Teunsang, ton ami spirituel depuis tant d'années, qui est revenu au plus vite dès qu'il a su la gravité de ton état. Sa générosité, son intégrité et son dévouement inlassable ont accompagné mes premiers pas dans le Dharma. Lama Tsultrim Gyamtso qui est venu plusieurs fois à l'hôpital et juste après ta mort, tous les lamas et enseignants présents, Maître Jyoji, mon vieil ami Frédéric Lama Tsultrim, Alain Duhayon et particulièrement le Vénérable Nyanadharo qui nous connait depuis son arrivée en France. Sa présence a été si précieuse et un véritable baume au coeur pour mon père, moi-même et je crois aussi mes frères.
Je remercie toute la communauté de Montchardon pour leur dévouement auprès de notre père, beau-père, grand père, durant toutes ces années, lors de ce dernier mois terrible d'hospitalisation, et pour l'organisation de ces funérailles bouddhistes, ce qui était le voeu exprimé par mon père dans son testament.
Je vous remercie vous tous, d'être venus si nombreux, ici ou à l'hôpital, vous ses amis, ses frères ou ses anciens collègues. Merci à Jean Marc qui a descendu mon père à l'hôpital, à Raia, à Véro et Fred, Martine et Jean-Marc, à Sébastien, Caecilia, Grete , Michel et Florence, Olivier, Daniel, Seunam, Claudia, Sabine, Claude et Michèle, Anna, Jean-Luc et tous ceux dont je ne me souviens plus des prénoms. Merci à tous ceux qui étaient prêts à venir le soigner à Montchardon. Merci à Farida et à Danielle de leur présence auprès de mon père et de leurs messages. Merci à mes amis qui m'ont soutenue dans ces moments difficiles, Anne Marie et Martine chères au coeur de mon père, Claude et Guy, Anne, Jean-Claude, Joël et Annie. Merci à Pierre, mon ancien compagnon, le père de mes enfants, qui est venu le voir tous les jours ce qui a beaucoup touché mon père. Merci à Odette de nous accompagner aujourd'hui.
Ce n'est pas facile de prendre la parole pour vous parler non du pratiquant, de l'enseignant, du fondateur de ce centre, ou de l'homme engagé totalement dans la diffusion du bouddhisme, mais de l'homme, du père qu'il a été. Un père qui a changé aussi au cours de toutes ces années. Un père généreux, dévoué, ouvert, fondamentalement bienveillant, mais aussi parfois absent.
Dans le dernier livre de souvenirs plus personnels qu'il était en train d'écrire, encouragé par le Vénérable, il parle de son idéal chevaleresque, et de bâtisseur qui l'animait, de son idéal monastique voire militaire, de son histoire qui avait fait de lui un homme qui avait beaucoup de mal à parler ou à montrer ses sentiments J'ai mis des années à différencier ce trait de caractère du véritable détachement ; et au cours de la traversée de sa dernière épreuve, il nous a dit en présence du Vénérable qu'il réécrirait ce livre différemment !
Je ne doute pas que son esprit ait pu trouver aujourd'hui la paix, mais j'ai envie, besoin de vous dire quelque chose de l'épreuve terrible de sa maladie, de son cancer du poumon, ses deux accidents vasculaires cérébraux et de son hospitalisation dans un univers parfois très « inhospitalier ». J'ai vu pour la première fois un homme, meurtri désemparé, angoissé, vulnérable, en tout cas devant moi, mais pas toujours devant ses amis qui venaient le voir. Il faisait alors toujours un effort pour être disponible et bienveillant. Pour la première fois, je l'ai vu oser demander de l'aide et dire sa sensibilité extrême à l'amitié et à la bienveillance dont il avait terriblement besoin, ce qui lui a fait demander une présence constante les derniers jours.
Merci à tous ceux qui ont été là !
Pour moi il a été vraiment humain, loin de l'idéalisation qui a pu être la mienne ou la vôtre. Cela a été pour moi un enseignement essentiel sur l'importance de l'amour et de la compassion, dans un véritable lien humain et incarné. Je l'ai entendu parler avec beaucoup d'amour et d' admiration de Bruno et Gaëlle qui se sont mariés une semaine après son hospitalisation, de sa tristesse de ne pas avoir pu être là, ni le temps de leur faire le cadeau qu'il souhaitait, de sa joie et sa fierté de voir les photos de ses petits enfants Jeremy, Nicolas, Mickael, Youri et Tara, et de leurs dessins affichés dans sa chambre à l'hôpital. De ceux de Tara qui faisaient l'admiration des infirmières et qui t'accompagnent dans ton dernier voyage. Les visites et les téléphones de Tara et de Youri étaient une joie pour lui.
Tu étais en souci constant pour Frédéric que tu aimais tendrement, et le Vénérable Nyanadharo lui a dit que tu lui faisais le cadeau de mourir le jour de son anniversaire en symbole de renaissance et d'une nouvelle vie. Bernard et Livia étaient tout aussi présents dans ton coeur. Les rigueurs de la neige leur ont fait manquer ton dernier souffle, mais ils ont pu rester près de toi à l'hôpital.Tu as même pu revoir tranquillement notre mère dont tu étais séparé depuis presque 40ans.
Au milieu de cette épreuve ton coeur s'est ouvert véritablement, et le mien également. Je voudrais papa te dire tout notre amour et notre gratitude pour tout ce que tu as été.
Au moment de ta mort, le Vénérable Nyanadharo, ami de plus de 30 ans, a eu une parole juste pour toi et pour chacun d'entre nous. Il nous a fait sentir une fois de plus la préciosité des liens du coeur, et du corps, chacun ayant une main posée sur toi en plus de la profondeur de l'attention juste. Grâce à sa Présence, et à celle de tous ceux qui étaient là, tu es mort en paix et lucidement.
Je pense aussi tout particulièrement à mes enfants Tara et Youri qui ont vécu cette expérience émouvante et douloureuse de tenir la main de leur grand père pour l'accompagner dans ce grand passage.
Merci pour tout et pars en paix.
Elisabeth Schnetzler